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Histoire des Autochtones du Canada
Tome I (10 000 à 1 000 avant J.-C.)

Les Platéliens moyens (Sommaire, Chapitre 18)

L'enregistrement archéologique sur le plateau canadien a suscité un conflit d'opinions concernant l'histoire culturelle de la région. Il semble que la nature parsemée de l'information et le régionalisme culturel aient constitué des obstacles à la rédaction de synthèses se rapportant à l'intérieur des terres du nord-ouest du pacifique en général et au plateau canadien en particulier (Leonhardy 1982 : 85). Le plateau canadien se compose des territoires compris entre la chaîne côtière et les montagnes Rocheuses, au sud jusqu'à la frontière internationale et au nord jusqu'à la source du fleuve Fraser à 54° de latitude. Les influences et/ou les gens pouvaient pénétrer dans la région depuis les plaines à l'est, le plateau de Columbia au sud, la côte du pacifique à l'ouest par l'intermédiaire des principales vallées fluviales, et la Cordillère au nord. Les limites de l'enregistrement archéologique ainsi que la confiance accentuée en des critères tels que la présence ou l'absence de microlames et la présence de certains types de pointes de projectile ont davantage compliqué la situation.


Construction d'une maison semi-souterraine Construction d'une maison semi-souterraine Construction d'une maison semi-souterraine
Construction d'une maison semi-souterraine du Platélien moyen

Les photographies illustrent trois étapes de la construction d'une maison semi-souterraine. Même si cette habitation en particulier est une copie d'une maison semi-souterraine récente, de telles maison semi-souterraines peuvent remonter à 2 500 avant J.-C.

(Reproduit de Wright 1976 : Planche 26. Voir Wilmeth 1977)


Ce qui suit est une ébauche de l'histoire culturelle de la région depuis 4 000 jusqu'à 1 000 avant J.-C. Dans cet ouvrage, on considère que la diffusion de la technologie et des autres secteurs culturels sont principalement responsables du changement culturel de préférence au remplacement des populations qui repose sur l'invasion, le déplacement ou l'absorption des peuples antérieurs. À notre opinion, les gestes techniques, notamment la préparation des nucléus à microlames, revêtent une signification relative et non absolue face à la classification culturelle. En d'autres mots, la présence ou l'absence d'un tel élément technique fournit en soi une base insuffisante pour signaler des événements majeurs dans le domaine de l'histoire culturelle. Tous les secteurs d'une culture devraient être pris en considération dans toute reconstitution historique des cultures et non seulement des éléments tirés d'un seul secteur, par exemple la technologie. Ceci dit, on admet volontiers que le terrain est fertile en débats; ce qui suit n'est que la perception d'une personne. Pour une considération succincte des problèmes auxquels doivent faire face les rédacteurs de synthèses relatives à l'archéologie du plateau canadien, voir Richards and Rousseau (1987).

Les Platéliens moyens sont les descendants des Platéliens anciens. Vers 4 000 avant J.-C. ou un peu auparavant, un changement graduel touchant le mode de subsistance/établissement correspondant à une économie saisonnière centrée sur le saumon conjointement avec l'introduction du propulseur depuis l'est et/ou le sud, a entraîné des changements reliés à l'ensemble de la culture. Contrairement à l'opinion préconisant une continuité culturelle adoptée dans cet ouvrage, une synthèse récente de l'archéologie du plateau a vu dans ces changements le témoignage de l'intrusion d'une population qui, remontant le fleuve Fraser à partir de la côte sans être adaptée à la pêche au saumon, n'était pas apparentée au Platélien ancien dont elle a remplacé les descendants (Stryd and Rousseau : Sous presse). Le développement de la tradition Pithouse du plateau vers 2 500 avant J.-C. comportant des village de maisons semi-souterraines près des rivières et la pratique d'emmagasiner le saumon correspond à un horizon culturel sur le plateau canadien. Reposant sur l'apparition des maisons semi-souterraines, cette tradition comportant une série de trois horizons (Richards and Rousseau 1987) constitue une façon flexible de classifier l'enregistrement archéologique mais ne justifie pas la recours à l'intrusion d'une population. La continuité culturelle entre le Platélien ancien et le Platélien moyen permet de croire que le changement culturel était le fait d'un peuple qui, indigène au plateau, adoptait lentement certaines innovations dont un mode de subsistance-établissement qui reposait sur le saumon. Cette transition vers des villages de maisons semi-souterraines semble avoir constitué un long processus. Contrairement à la controverse que suscitent les origines du Platélien moyen, il semble y avoir consensus sur le fait que le Platélien moyen constitue la base culturelle dont est issu le peuple de langues salish que les Européens ont rencontré au début du 19e siècle.

Il faut admettre que le Platélien moyen est une reconstitution mal définie. La partie ancienne du développement culturel n'a pas été identifiée dans les régions voisines d'Okanagan et d'Arrow Lakes du centre-sud de la Colombie-Britannique. Dans la région de Kootenai, dans le sud-est de la Colombie-Britannique, l'enregistrement archéologique est, à maints égards, comparable à celui du Planussien moyen. Les renseignements concernant la subsistance du Platélien moyen sont à la fois limités et concentrés dans les principales vallées fluviales. Alors que le saumon et le chevreuil semblent avoir revêtu une très grande importance, toutes les ressources ont été exploitées depuis les moules d'eau douce jusqu'aux mouffettes,. Il est impossible en ce moment d'évaluer le rôle de la nourriture d'origine végétale qui était pourtant si importante dans le régime alimentaire des gens lors du contact avec les Européens. Vers 2 500 avant J.-C., la subsistance a commencé à se concentrer de plus en plus sur la récolte du saumon et d'autres poissons anadromes (Kuijt 1989). On a pensé que le changement qui a affecté le mode de susbsistance était relié à des facteurs environnementaux notamment le climat de plus en plus frais et humide qui a fait augmenter le niveau d'eau des rivières et qui, par conséquent, a multiplié les zones de frai. L'usage de la pierre locale pour le façonnage des outils indique des communications limitées avec les cultures voisines. On trouve des pièces en coquillage marin et en pierre exotique mais elles sont extrêment rares. Ce n'est que vers le fin de la Période III, au moment où l'importance accordée au saumon a entraîné le changement du mode d'établissement, que les communications avec l'extérieur, particulièrement avec la côte, deviennent évidentes.

Les archéologues œuvrant sur la plateau canadien peuvent percevoir certains des commentaires précédents comme une critique personnelle mais ce n'est pas le cas. Rédiger une synthèse reliée au plateau est une tâche exceptionnellement difficile (Richards and Rousseau 1987). Les fouilles archéologiques se sont généralement concentrées sur les grands villages de maisons semi-souterraines à occupation multiple situés dans les vallées fluviales et ont nécessairement fourni un échantillon biaisé. Le caractère extrême de la topographie de la région aux ressources variables requiert un mode d'établissement dispersé comportant d'innombrables petits sites de campement provisoire et des débris culturels limités. Le processus naturel de sédimentation a oblitéré ou occulté une bonne partie de l'ancien enregistrement archéologique. Et, finalement, la topographie à caractère de cul-de-sac de la région se prête à un degré exceptionnel de régionalisme culturel. Ceci étant dit, il y a eu une tendance à relier trop étroitement l'histoire culturelle locale aux développements culturels de la côte, des plaines, du sub-arctique et du plateau de Colombia. Comme c'est le cas ailleurs, la reconstitution culturelle et l'identification des cultures reposant sur une confiance excessive eu égard à l'industrie des microlames et à la typologie des pointes de projectile ont entraîné inévitablement des interprétations différentes.

À la période historique, la région était occupée par les membres de la famille linguistique salish (Kinkade and Suttles 1987). Les exceptions étaient/sont une petite enclave de parlants Nicola Eyak-Athapascan et le Kootenai ou Kootenay. Cependant, quant aux parlants Kootenai, un lien "génétique éloigné" avec le Salish (Campbell and Mithun 1979 : 37-38) est possible. Les langues indiennes du nord-ouest de l'Amérique du Nord, depuis le nord de l'Orégon jusqu'en l'Alaska et au piémont à l'est des montagnes Rocheuses, partagent plusieurs éléments linguistiques qui témoignent d'ancêtres communs ou d'une convergence d'éléments linguistiques en raison d'étroites communications sur une longue période de temps. Du point de vue de la linguistique, la situation est unique en Amérique du Nord. L'hypothèse d'une population originelle indigène qui change sa culture en raison d'une adoption sélective d'innovations semble s'accorder avec le témoignage linguistique. Une hypothèse d'une origine in situ nierait le comportement atypique des chasseurs-cueilleurs eu égard à la conquête territoriale que suppose l'alternative de l'hypothèse de remplacement.

Il y a un large consensus sur le fait que l'événement le plus important qui a affecté le développement du Platélien moyen durant la Période III a été la transition depuis l'état de peuple mobile de chasseurs à l'état de résidents de villages semi-permanents qui dépendaient de plus en plus du saumon entreposé comme source première de nourriture en hiver (Kuijt 1989). Cette transition à la vie de village a commencé vers 2 000 avant J.-C.


 
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