Les sociétés secrètes et leurs danses commencèrent à disparaître à l'arrivée des missionnaires, au milieu des années 1870. Une photo montre les participants aux dernières danses de société secrète à Skidegate, dans les années 1880. On y voit certaines jeunes femmes portant des masques, tandis que d'autres arborent des ornements frontaux ou ont le visage peint.
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Masque de jeune femme portant un petit labret de coquille d'haliotide et au visage orné de peinture faciale. Le bord sculpté évoquant des écailles rouges est inusité.
Recueilli dans Haida Gwaii en 1879 par Israel W. Powell.
MCC VII-B-928a (S85-3284) |
Chez les Haïdas, les masques étaient surtout utilisés par des membres des sociétés secrètes. Dans les danses de ces sociétés, on se servait souvent à la fois de masques et de marionnettes pour représenter des esprits sauvages des bois, que les Haïdas appelaient gagiid. Ils se distinguent par un visage émacié ou ridé et une bouche grimaçante, et sont souvent bleu- vert, pour indiquer qu'ils représentent une personne qui a failli se noyer et dont la chair s'est refroidie, ayant séjourné longtemps dans l'eau froide.
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Tête d'une poupée gagiid utilisée dans des danses de société secrète. Le corps de tissu ainsi que les mains et les pieds en bois sont disparus.
Recueillie à Masset avant 1900 par Charles F. Newcombe.
MCC VII-B-526 (S94-6728) |
À l'instar de leurs voisins tsimshians, les Haïdas employaient des masques dans des spectacles de potlatch pour représenter les êtres spirituels (geni loci) rencontrés par leurs ancêtres. Malheureusement, on en sait beaucoup moins sur ces masques d'êtres surnaturels haïdas que sur les masques des nox nox (ou esprits surnaturels) chez les Tsimshians, qui ont gardé leurs traditions vivantes jusqu'à ce jour dans certains villages de l'intérieur.
L'influence du marché touristique sur la fabrication des masques haïdas est difficile à évaluer. Après les années 1840, les masques et les sculptures en argilite étaient les objets les plus recherchés par les marins, les marchands et les touristes, et il est probable que plusieurs milliers de masques haïdas figurent dans des collections privées ou de musées un peu partout dans le monde. Déterminer quels masques ont été faits pour une utilisation traditionnelle plutôt que pour être vendus est essentiellement une question de jugement. Différents indices peuvent attester qu'un masque a pu être véritablement utilisé : des signes d'usure sur les attaches de cuir et la surface intérieure, le caractère fonctionnel des trous pour les yeux, la possibilité de bien ajuster le masque sur le visage, des vestiges de tissu ou de fourrure arrachés avant la vente de l'objet ainsi que de colle et de duvet ou d'écorce de cèdre. On déduira au contraire que le masque a été fait pour les touristes s'il n'y a pas moyen de le fixer à la tête, si l'intérieur n'a pas été travaillé de façon à éviter au nez du porteur de frotter et s'il n'y a pas de trous fonctionnels pour les yeux.
On sait que des artistes célèbres tels que Simeon Stiltla et Charles Edenshaw ont réalisé des masques à usage cérémoniel, par exemple le complexe masque de métamorphose de Charles Edenshaw qui se trouve actuellement au Pitt Rivers Museum de l'Université d'Oxford.
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