Au cours de l'escale, les
obligations religieuses du dimanche sont respectées.
Les marins se rendent à l'église la plus
proche pour assister à la messe. Lorsque le temps ou
les travaux sont pressants, l'équipage est
partagé en deux groupes qui vont à l'office
l'un après l'autre. Les officiers assistent
généralement à la grand-messe, mais
aujourd'hui, ce 10 février, presque tous les hommes
sont descendus à l'église Saint-Martin de
l'île de Ré. Cette église du
XVe siècle, appelée le Grand Fort
en raison des fortifications qui la protégeaient,
avait été restaurée au début
du XVIIIe siècle après avoir
été bombardée par la flotte
anglo-hollandaise en 1696. Une de ses chapelles regroupait
déjà les ex-voto offerts par les marins. Mais
revenons au journal de notre pilote.
Dimanche, 10e jour de février 1754
À 7 heures du matin, j'ai été à
terre dans notre chaloupe avec onze hommes pour la messe
à l'église Saint-Martin-de-Ré,
après quoi j'ai passé la journée avec
le capitaine. J'ai recommandé à tout
l'équipage de se ranger à
bord 40
vers midi ou au plus tard vers 2 heures. Autour de 4 heures,
j'ai envoyé deux hommes chercher de côté
et d'autre le reste de l'équipage puisqu'ils ne
s'étaient pas rangés comme je l'avais
demandé. Tous sont rentrés à bord de la
chaloupe, sauf le charpentier et Jacques Philippe, un
novice 41.
Cela ne nous a pas empêchés de nous embarquer.
Nous nous sommes rendus à bord de notre navire
dès que le lamaneur de l'île de Ré est
arrivé, s'est présenté et embarqué
pour monter la rivière avec nous. Nous sommes
arrivés à bord du navire entre 5 heures et
demie et 6 heures du soir.
Lundi, 11e jour de février 1754
Vers 6 heures du matin, nous avons levé nos ancres
et appareillé de la fosse de
Loix 42
pour monter la Seudre. Après avoir appareillé,
nous avons envoyé la chaloupe à terre pour
chercher et prendre le charpentier et Jacques Philippe. Ils
étaient présents et se sont embarqués
sur le champ. Dès que tous ont été
à bord, nous avons manuvré, ayant les
vents au ONO.
Au cours de la journée, les vents sont venus à
l'Ouest et OSO. Nous sommes allés mouiller à la
balise du Nord vers 5 heures du soir, les vents étant
trop près pour aller mouiller dans les courants.
Mardi, 12e jour de février 1754
Vers 6 heures du matin, nous avons appareillé de la
balise du Nord, ayant pour lors les vents au SO. Nous avons
lovoyé 43
jusqu'à la fosse des Landes, deux longueurs de
câble au Sud du fort du
Chapus 44,
où nous avons mouillé vers 8 heures du
matin 45.
Nous y sommes restés jusqu'à la fin du jour et de
la nuit en raison du vent contraire; la marée de
l'après-midi était trop tardive pour mettre à
la voile 46.
Mercredi, 13e jour de février 1754
Sur les 5 heures après-midi, les vents sont venus au ONO,
grand vent. Nous avons mouillé notre petite ancre par
précaution pour la nuit.
Jeudi, 14e jour de février 1754
À 8 heures du matin, nous avons levé nos deux
ancres et avons appareillé de la fosse des Landes pour
aller mouiller sur la
Seudre 47,
ayant les vents au NNO, beau frais. Nous y sommes arrivés
environ sur les 9 heures et demie, et y avons
affourché 48
avec nos deux ancres et serré nos voiles. À 2
heures de l'après-midi, le capitaine est allé
faire ses affaires à La
Tremblade 49
avec cinq hommes dans notre chaloupe. Il est revenu sur les 6
heures du soir avec les hommes.
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