Comme le changement de paradigme 100 ans
plus tôt, qui a marqué le départ de l'ère
agricole, la dernière décennie du 20e
siècle a fait passer la grande majorité de la population
mondiale d'une existence industrielle à l'ère du savoir et
de la technologie à grande vitesse.
La dépendance croissante des communications satellites, du
courrier électronique, de la câblodiffusion et de l'Internet
a concrétisé le « village planétaire » de
Marshall McLuhan. Un tel changement majeur dans les affaires, le mode de
vie et la réflexion s'accompagnait également de risques
élevés, comme nous l'avons constaté en 1999 avec la
crainte non concrétisée d'une panne mondiale des
systèmes informatiques au tournant du siècle.
La récession du début des années 90 a eu de
nombreux effets graves et à long terme sur l'économie
canadienne. Un des plus importants de ces effets était
l'émergence d'un nouveau niveau de détresse sociale,
appelée la « nouvelle pauvreté ». Les niveaux de
pauvreté parmi les familles et les enfants, en particulier, parmi
les familles monoparentales, ont augmenté depuis le début de
la récession, malgré les nombreux programmes sociaux
existants.
L'expérience des personnes âgées du Canada tout au
long des années 90 a constitué une exception notable
à cette résurgence contemporaine de la pauvreté. En
moyenne, le revenu et le niveau de vie des Canadiens âgés ont
continué de croître et de s'améliorer. En 1997, 19 p.
100 des personnes âgées du Canada avaient un faible revenu,
comparé à 34 p. 100 en 1980. En se fondant sur les mesures
après impôt, le taux de faible revenu parmi les personnes
âgées est tombé à 9 p. 100. Ce
développement incongru par rapport à la croissance des taux
de faible revenu parmi la population entière était en grande
partie le résultat de l'expansion du système de pensions
gouvernementales du Canada.
L'amélioration rapide de la situation financière des
personnes âgées dans la société canadienne a
donné lieu à de nombreuses initiatives stratégiques
qui ont permis de s'assurer que le système de pensions
gouvernementales est suffisamment solide pour financer le nombre croissant
de personnes devant prendre leur retraite au cours de la prochaine
génération. Malgré ces changements positifs, les
recherches ont également laissé supposer que les jeunes
Canadiens doivent se concentrer sur leurs stratégies de retraite,
s'ils veulent s'assurer que leur revenu de retraite reste comparable
à leur revenu pendant leur vie active.
À la fin des années 90, Statistique Canada
prévoyait que, d'ici à 2041, 25 p. 100 de la population
canadienne serait âgée de 65 ans ou plus. À mesure que
les soins de santé s'amélioraient rapidement, l'on
s'attendait à ce que les Canadiens aient une retraite plus longue
à l'avenir. En outre, il était devenu de plus en plus
difficile pour de nombreuses personnes d'épargner en vue de leur
retraite, à mesure que le nombre d'emplois temporaires ou à
temps partiel croissait. Ces emplois n'offraient
généralement pas d'avantages sociaux aux employés
qui, s'ils avaient le revenu disponible nécessaire, devaient
économiser de l'argent en vue de leur retraite.
Le nombre ainsi que le pourcentage des personnes âgées au
Canada augmente chaque année lorsque les membres les plus
âgés du « baby-boom » prennent leur retraite.
L'effet que cela aura sur les pensions gouvernementales du Canada sera
profond et nécessitera une gestion prudente de la part des
programmes de pensions. Dans les années 1990, des ajustements faits
aux programmes avaient été conçus pour ce genre de
défis. (Statistique Canada, Un portrait des aînés au
Canada (Ottawa 1995), p. 7.)
Les années 90 ont également été
marquées par la mondialisation croissante. Les Canadiens avaient de
plus en plus d'opportunités à l'échelle mondiale de
mettre à profit des marchés plus importants et de
transcender les frontières sociales, politiques et
économiques. Le mouvement des personnes et du savoir a
dépassé le cadre des frontières nationales pour se
faire à l'échelle internationale.
La croissance du nombre de femmes intégrant la population active
a été un des changements les plus importants dans la
composition de la main-d'uvre canadienne à la fin du
20e siècle. Le nombre de femmes au travail entre 45 et
54 ans a augmenté de 41 p. 100 en 1971 à 72 p. 100 en 1999.
L'on s'attendait à ce que ce changement aide à
atténuer l'incidence financière de la croissance de la
proportion de personnes âgées dans la société
canadienne, et ce, parce que, à mesure qu'un nombre croissant de
femmes intégrait la population active, le pourcentage de Canadiens
employés augmenterait par rapport au pourcentage croissant de
personnes à la retraite.
Le rapport entre le nombre de retraités et le nombre de
personnes employées - le ratio de dépendance - sert à
calculer l'incidence financière du vieillissement de la population
canadienne. Il convient de remarquer que le ratio de dépendance du
Canada après la Seconde Guerre mondiale, y compris les enfants et
les personnes âgées comme personnes à charge,
était considérablement plus élevé que le
chiffre prévu en 2040.
L'évolution du rôle des femmes dans la
société canadienne a remis en question de nombreuses notions
traditionnelles concernant la famille. À la fin des années
90, le concept même de ce que constituait une famille a
été repensé. Les homosexuels sont devenus plus actifs
et ont adopté un franc-parler afin d'essayer d'obtenir un plus
vaste éventail de droits légaux. Tout au long des
années 90, la question de l'extension des droits conjugaux des
conjoints de fait de sexe opposé aux couples de même sexe est
devenue un important enjeu politique.
Il est intéressant de noter que, contrairement à
l'âge et à l'invalidité mentale et physique,
l'orientation sexuelle n'était pas mentionnée dans les
droits à l'égalité énoncés dans
l'article 15 de la Charte canadienne des droits et
libertés. Cependant, depuis 1985, année où
l'article 15 est entré en vigueur, un certain nombre de
décisions de la Cour suprême du Canada a établi que
les autres groupes minoritaires victimes de discrimination par le
passé jouissaient également de la protection de l'article
15. Ainsi, la protection contre la discrimination fondée sur
l'orientation sexuelle a été ajoutée aux droits
à l'égalité des Canadiens pour des motifs analogues,
malgré le fait qu'elle n'était pas explicitement
mentionnée dans la Charte canadienne des droits et
libertés.
Ce développement a été renforcé en 1996
lorsque la Loi canadienne des droits de la personne a
été modifiée pour inclure, dans ses articles,
l'exemption de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.
En 2000, le gouvernement fédéral a reconnu cette
modification en étendant aux couples de même sexe les droits
et obligations dont jouissaient auparavant uniquement les conjoints de
fait de sexe opposé. Cette initiative a eu des conséquences
importantes pour le système de pensions gouvernementales du Canada.
Les conjoints de même sexe ont obtenu les mêmes droits et
obligations que les conjoints de fait de sexe opposé le
31 juillet 2000.