Àcompter de la fin des
années 60, une série de rapports gouvernementaux furent
publiés, la plupart faisaient valoir que la pauvreté
était encore un problème grave au Canada. Il y eut, entre
autres, un Livre blanc fédéral intitulé La
sécurité de revenu au Canada (1970), qui
alléguait que le système de pensions gouvernementales du
Canada n'en faisait pas suffisamment pour éliminer la
pauvreté et ce parce que la nature universelle et les montants
modestes de la Sécurité de la vieillesse, combinés au
fait que le Supplément de revenu garanti n'était qu'une
mesure temporaire à cette époque-là,
empêchaient une redistribution de la richesse - ou le versement de
prestations considérablement plus élevées aux
personnes à faible revenu - par le biais des régimes de
pensions gouvernementales existants.
En réponse, le gouvernement fédéral tenta
d'accroître l'équité des pensions gouvernementales du
Canada en maintenant les prestations universelles de la
Sécurité de la vieillesse pour toutes les personnes
âgées, en introduisant l'Allocation au conjoint et en
augmentant ensuite les prestations du Supplément de revenu garanti
afin d'aider les plus démunis. En 1971, le Supplément de
revenu garanti devint un programme permanent.
Dans le discours du Trône de janvier 1973, le gouvernement du
Canada répondit à d'autres demandes émanant de la
Conférence constitutionnelle de 1971. Il déclara que les
gouvernements fédéral et provinciaux devraient examiner
conjointement le système de sécurité sociale du pays
- ses politiques et programmes. Ils devaient également
élaborer ensemble des réformes. Ces dernières ont
fourni aux Canadiens des programmes plus efficaces et ont mis en place de
nouveaux moyens d'harmoniser et d'intégrer les
éléments fédéraux et provinciaux du
système. Tout cela devait se réaliser en respectant le cadre
constitutionnel existant.
L'examen de la sécurité sociale commença en avril
1973 par la publication du Document de travail sur la
sécurité sociale au Canada du gouvernement
fédéral, qui contenait des propositions conçues pour
décrire les grandes orientations de la politique susceptibles de
déboucher sur un système de sécurité sociale
meilleur et mieux intégré. Certaines propositions portaient
sur l'augmentation du montant de la Sécurité de la
vieillesse et l'indexation entière de la Sécurité de
la vieillesse et du Supplément de revenu garanti. Ces propositions
furent acceptées.
À la fin des années 70, l'approche du gouvernement
fédéral concernant les pensions gouvernementales
commença à changer, alors que l'inflation
élevée et la récession déclenchée par
la crise du pétrole de 1973 exerçaient des pressions sur ses
recettes.
Ce ralentissement économique s'accompagna de la
résurgence d'une philosophie économique appelée le
monétarisme. Les monétaristes mettaient l'accent sur la
réduction des dépenses du gouvernement afin de
réduire la dette et sur la réduction de la participation du
gouvernement à l'économie en diminuant les dépenses
au titre des programmes gouvernementaux, comme les pensions.
L'expansion de la pensée monétariste contribua à
une démarcation par rapport à l'augmentation des
dépenses dans les programmes de pensions gouvernementales à
la fin des années 80. À cette époque-là, les
responsables de l'élaboration des politiques continuaient à
se concentrer sur la réalisation du principe de la redistribution,
mais ils cherchaient également à réduire la
portée générale des programmes de pensions
gouvernementales du Canada.
La réticence du gouvernement fédéral à
augmenter les dépenses de pensions gouvernementales apparut au
début des années 80, alors que l'inflation et les taux
d'intérêts avaient atteint un sommet.
Il importe de noter que, à l'origine, l'excédent du
Régime de pensions du Canada devait croître
considérablement afin d'offrir des prêts aux gouvernements
provinciaux, ce qui arriva très rapidement après son
entrée en vigueur. Par contraste, depuis 1972, lorsque
l'impôt de sécurité de la vieillesse cessa
d'être perçu, la Sécurité de la vieillesse et
le Supplément de revenu garanti furent financés à
partir des recettes fiscales générales levées tous
les ans.
Un autre fait tout aussi important est que, contrairement au Programme
de la sécurité de la vieillesse, tout changement
apporté au Régime de pensions du Canada nécessite le
consentement des deux tiers des provinces représentant au moins les
deux tiers de la population du Canada. Cela signifie que les provinces
jouent un rôle important dans la surveillance du Régime de
pensions du Canada. En conséquence, il est plus difficile
d'apporter des changements importants à celui-ci, étant
donné qu'un si grand nombre de gouvernements différents
doivent donner leur approbation.
La « vulnérabilité » législative
éventuelle du Programme de la sécurité de la
vieillesse et du Supplément de revenu garanti en comparaison avec
le Régime de pensions du Canada devint évidente en 1983 et
1985. En 1983, la Sécurité de la vieillesse fut assujettie
à une indexation limitée de 6 et 5 p. 100 introduite par le
gouvernement pour maîtriser l'inflation. Le Régime de
pensions du Canada n'était pas assujetti à cette
disposition. En mai 1985, le gouvernement fédéral
nouvellement élu annonça que les prestations de la
Sécurité de la vieillesse ne seraient plus indexées
sur l'indice du coût de la vie. En fin de compte, ce changement
n'entra toutefois pas en vigueur en raison de la forte opposition de la
part d'organisations de personnes âgées et d'autres groupes
qui les appuyaient.
Tout au long des années 80, le gouvernement
fédéral chercha de plus en plus à réduire ses
dépenses. En 1989, les prestations de la Sécurité de
la vieillesse que touchaient les personnes âgées dont le
revenu annuel était supérieur à 50 000 $
étaient réduites par le jeu de l'imposition. Ainsi,
certaines personnes âgées recevaient peu ou pas de
Sécurité de la vieillesse, et le caractère universel
du programme disparut essentiellement.
C'est à la fin des années 70 et au début des
années 80 que le public commença à faire part de ses
préoccupations quant à la viabilité financière
du Régime de pensions du Canada. Le ralentissement
économique des années 80, la réalisation croissante
que la population canadienne vieillissait rapidement à mesure que
la génération importante du baby-boom prenait de
l'âge, et la chute du taux de natalité national
menèrent bon nombre de personnes à se demander si le
Régime de pensions du Canada existerait encore au
21e siècle.
Les recherches effectuées à cette époque-là
indiquaient que 7,8 p. 100 de la population du Canada était
âgée de 65 ans ou plus en 1951, chiffre qui avait
grimpé à 8,1 p. 100 en 1971. Selon les prévisions, ce
chiffre devait atteindre un sommet de 19,6 p. 100 en 2031. Cette
évolution démographique aggrava la préoccupation
quant à la sécurité financière du
système de pensions gouvernementales du Canada. (Conseil national
du bien-être social, Soixante-cinq ans et plus (Ottawa,
1984), page 4.)
De toute évidence, la période allant de la fin des
années 60 à la fin des années 80 a connu des
années de grand changement dans la politique relative aux pensions
gouvernementales du Canada. La capacité d'élargir et
d'améliorer chaque programme diminua à la fin des
années 80 lorsque le gouvernement fédéral
commença à réduire ses dépenses en raison du
ralentissement économique et de la nécessité de
réduire la dette. À la fin des années 80, l'avenir
des pensions gouvernementales du Canada semblait incertain pour de
nombreuses personnes.